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Et si, la blockchain renforçait les plateformes centralisées (sic) en simplifiant leur chaine de valeur ? (première partie)

Résumé : les plateformes centralisées ne vont pas disparaitre et vont intégrer la technologie blockchain tout en restant centralisées. Car elles restent maitresses de l'ensemble des moments de vérités de la mise en relation. Ces moments constituent le Design de la Confiance, qu'on peut qualifier de chaine de valeur des plateformes centralisées. Alors oui, la transaction qui constituait une barrière à l'entrée de cette chaine de valeur tombe grâce à Blockchain. Ce qui va du coup pousser ces plateformes à se réinventer dans une certaine mesure, sans pour autant être court-circuitées...

"Confiance à l'ère des plateformes, quelles garanties ?" (crédit image CNUM ). Et qu'apporte la blockchain ? 


Je complète ici ma réflexion concernant la technologie blockchain et son impact sur la stratégie de marque et les plateformes centralisées (lire mon premier billet à ce propos). 

Je publie ce billet clairement à contre courant et qui porte sur un sujet que je trouve complexe... J'en prends le risque, en échange de votre bienveillance ;). 

Je vais procéder en 2 parties. 


Première partie : Et si, la blockchain renforçait les plateformes centralisées (sic) en simplifiant leur chaine de valeur ? 


Quand j'ai découvert blockchain en 2015, j'ai percuté qu'en permettant une sécurisation de la transaction sans nécessiter un tiers de confiance central, on allait voir fleurir des plateformes décentralisées, des anti Uber, etc. Qu'en levant le doute sur la transaction devenue transparente et infalsifiable, on allait avoir des plateformes de confiance 3.0 ! Et qu'on pouvait espérer que ce tiers de confiance centralisé (tel que Uber, Amazon, le Boncoin, Blablacar ou Priceminister, Airbnb,...) pourraient donc se faire court-circuiter au profit d'une plateforme distribuée ! Que c'était la fin annoncée du modèle centralisé, façon GAFA qui en est l'archétype. Et qu'un autre monde numérique (économique et politique) était possible, plus respectueux des utilisateurs que ceux-ci soient shoppers ou usagers! Car qui dit décentralisé, dit plus de transparence et davantage de contrôle sur les données personnelles par les utilisateurs eux même car protégés par la blockchain ! 

Et bien plutôt non que oui car je pense que la blockchain va renforcer les plateformes centralisées. Mais vont devoir aussi s'adapter. 

Je m'explique :


Le Design de la confiance comme chaine de valeur des plateformes centralisées 


Petit rappel sur les plateformes centralisées digitales : elles constituent et animent une place de marché par la mise en relation électronique entre une offre et une demande, quelle soit gratuite ou payante, à usage consumériste, citoyen, artistique, solidaire, peu importe. Il y a commande, livraison et utilisation d'un bien ou d'un service, le tout formant de l'engagement à la jouissance du service ou produit. Ce qu'on appelle l'expérience utilisateur. D'où l'intérêt des plateformes de marché dont le métier consiste précisément à mettre en relation, simplement, efficacement, en toute sécurité, une offre et une demande. Pour ce faire, ces plateformes ont construit leur proposition de valeur sur le design de la confiance. En échange, elles captent les données qu'elles enrichissent et revendent ensuite. Ce design de la confiance est un chemin parsemé de moments clés, les fameux moments de vérité. La transaction est un de ces moments de vérités mais n'est pas le seul. L'ensemble des moments de vérité auquel est confronté l'utilisateur, constitue la boucle de confiance qui fonde l'engagement final. 

En effet, que l'on soit en B2C ou C2C, B2B, la confiance se fonde aussi et surtout sur le bien ou le service que l'on vend ou échange, donc sur la réputation du produit, du service et de l'offreur notamment. Il y a donc la confiance dans la transaction mais aussi la confiance dans la qualité perçue du produit ou service. Blockchain réassure sur la première (la transaction) mais il faudra toujours une plateforme de marque et d'accréditation, de réputation des offreurs pour compléter la boucle de confiance. 
Pour la plateforme de services, Uber par exemple, le client a besoin d'être rassuré sur la qualité des véhicules, leur disponibilité et ponctualité et sur la sécurité et fiabilité de conduite des chauffeurs, sur le prix... De même, sur une plateforme ecommerce C2C ou B2C, l'acheteur aura toujours besoin de garanties de confiance quand à la crédibilité du vendeur (et pas seulement de l'authenticité du vendeur) et la qualité de son produit ( et pas seulement du paiement du produit). 

La reputation de l'offreur (vendeur, loueur,...) et la fiabilité du service ou produit sont précisément accrédités et centralisés par et sur les plateformes centralisées. Et je pense que ce type de plateforme ont la facilité pour le faire. Car c'est dans leur gène.

C'est dans leur gène car la proposition de valeur des plateformes centralisées est de construire et animer la confiance grâce:

> à une audience active de masse d'utilisateur (la fameuse masse critique) et une communauté vivante d'utilisateurs acheteurs qui conversent, discutent et donc font vivre l'offre et son degré de confiance. On parle de communautés de marque

>à leur capacité à rendre visible sur l'ensemble des canaux opportuns les notations et avis sur ces acheteurs quand à leur expérience d'achat notamment dans les moteurs de recherche et agrégateur d'avis thématiques. On parle de community management

> à "algoritmer" la relation client, plus personnelle, plus opportune, plus contextuelle, plus rapide, voire anticipatrice. On parle de Data driven et de responsive marketing.
In fine, ces plateformes centralisées, sont des designers de la confiance et se rémunèrent en vendant de la confiance (l'expérience vécue du service ou produit tout le long du parcours) contre nos données à partir desquelles elles puisent des revenus certes mais aussi des insights pour affiner leur propre offre. Ces plateformes construisent au final leur reputation de marque sur la confiance. Qui du Boncoin, qui d'Amazon marketplace, qui de Priceminister Rakuten, qui d'Uber, AirbnB, etc.


La blockchain finalement simplifie l'expérience d'achat pour le vendeur et l'acheteur et surtout in fine, fortifie plus encore la plateforme en renforçant son crédit de confiance.

Mais il est une autre qualité essentielle des plateformes centralisées et qui contribue aussi au design de la confiance : la trouvabilité du produit ou service . Cet attribut propre aux plateformes centralisées constitue un atout concurrentiel puissant contre les nouvelles plateformes dites décentralisées ou distribuées. Une nécessaire et vitale performance de visibilité de marque de la plateforme doit être garantie pour mettre en relation offreurs et acheteurs, et rendre visible les services ou bien offerts. Une plateforme distribuée et émergente peut difficilement rivaliser face à un GAFA ou une marque qui maitrise les rouages de l'expérience utilisateur, pour rendre visible la notoriété de ses biens et services ainsi que la reputation du vendeur (notation et avis).

Ainsi, la blockchain n'est qu'un outil de plus pour renforcer un des éléments de la boucle de
confiance : la fiabilité de la transaction. C'est un outil qui renforcera plus encore le GAFA comme la plateforme de marque c2c ou b2C, et b2b, et donc leur "autorité centrale".

En résumé, le design de la confiance se construit sur les moments de vérité pour l'utilisateur dans son parcours. La blockchain en sécurisant la transaction (la certification d'achat est réputée "par défaut de pleine confiance"), "supprime" en quelque sorte,  la transaction comme un des moments de vérités pour l'acheteur et le vendeur; mais les autres moments de vérité demeurent et fondent la décision d’engagement et la meilleure satisfaction client.

Ces autres moments de vérités sont :


> la prise de connaissance de la qualité de service ou du bien acheté (expérience d'achat + livraison + expérience produit + recommandation),

> la prise de connaissance de la réputation (notation) de l’offreur et/ou du loueur

> la visibilité, trouvabilité des biens et services et donc du portail qui les centralisent, à savoir la plateforme centrale, qui pour se faire doit s'animer en plateforme de marque sur les canaux numériques : indexation, publicité en temps réel personnalisée et contextualisées, data intelligence, storytelling ou brand content, expérience utilisateur exemplaire, vivacité d'une communauté de marque, aide à la vente et SAV intelligent (AI), intelligence multicanale, logistique des commandes, fiabilité technologique, ...bref tout l'arsenal de la guerre digitale.


Alors, oui, le design de la confiance a un coût : capter nos données en échange de la mise en relation entre une offre et une demande. La logique GAFA ne sera pas remise en cause par la blockchain. Au contraire, ces plateformes centralisées vont s'en trouver renforcées par la blockchain puisqu'elle simplifie le parcours d'achat en levant un frein majeur : le risque du mauvais payeur ou de "l'arnaqueur", selon que l'on se place du coté de l'offreur ou demandeur.


Vous êtes encore là ? Merci de m'avoir lu jusqu'ici ! Je suis conscient que je viens d'irriter quelques uns d'entre vous...(Moi, le premier en fait... c'est mon coté schizo...). Cependant, si ces plateformes centralisées ne vont pas disparaitre et au contraire se renforcer grâce à la blockchain, et donc ne pas forcément rebattre les cartes du pouvoir, elles vont devoir se réinventer dans cette guerre de la confiance. Sujet que j'aborde dans une seconde partie : Les enjeux de réinvention des plateformes centralisées qu'impose la blockchain.


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